La pièce Les Belles-Soeurs, écrite par Michel Tremblay en 1968, n’a pas perdu de son charme et de son humour, même en fêtant cette année son cinquantième anniversaire. Depuis 2010, elle a repris vie sous la forme d’une comédie musicale. Présentée en première médiatique le 17 octobre dernier au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts de Montréal, l’oeuvre musicale a réussi à toucher le coeur du public, car elle rappelle notre passé, mais reste d’actualité. Son metteur en scène René Richard Cyr a su garder l’essence originale et son propos féministe tout en modernisant le côté scénique. La musique composée par Daniel Bélanger fait sourire, réfléchir, divertit et nous fait compatir avec ces femmes fortes sur scène.
Les Belles-Soeurs sont 12 actrices talentueuses qui nous chantent pendant plus de deux heures le quotidien féminin de 1960. Germaine Lauzon, interprétée par la charismatique Kathleen Fortin, convie ses amies et sa famille à un party de femmes dans sa cuisine. La raison de ce ralliement est qu’elle a remporté un million de timbres Gold Star et a besoin de mains pour coller ses timbres dans des catalogues.
C’est une ode à la consommation de masse que Germaine Lauzon fait en recevant son butin de timbres et en chantonnant la pièce Gratis. Elle se sent au paradis, car elle pourra se payer des meubles, des électroménagers et décorer son univers de ménagère qui est sa maison. Le personnage de Madame Brouillette (Geneviève St Louis) est le premier à débarquer à la soirée. La voisine de Germaine le dit d’entrée de jeu, elle est très jalouse. Geneviève St Louis est notre coup de coeur. Elle joue avec brio le personnage le plus désespéré et frustré de la distribution.
Des femmes fortes
Tour à tour, les femmes arrivent et aucune d’entre elles ne gardera sa langue dans sa poche. Ensemble, elles rient, elles dénoncent les injustices, elles font du commérage, elles jugent celles qui ne sont pas au party, mais surtout elles se rassemblent, car elles vivent la même situation en étant femmes au foyer. Rose Ouimet (l’attachante Sonia Vachon), soeur de Germaine, dénoncera sa frustration d’être dans un mariage qui la rend malheureuse avec la pièce Maudit Cul. La mélancolie des femmes se fait sentir sur scène.
Lorsque Pierrette Guérin (l’ardente Éveline Gélinas), la sœur reniée, revient dans le décor, les femmes sont estomaquées. Pierrette travaille dans un club, elle s’habille sexy et elle est bien dans sa peau. Son émancipation est mal vue par les femmes au foyer qui la voient comme une prostituée. Les Belles-Soeurs sont tous les types de femmes, l’hyper-croyante, la condescendante, la fille enceinte, la frustrée, la vieille au corps fragile et en même temps elles se ressemblent toutes.
Ode au Bingo
Le décor est composé de la cuisine kitch de Germaine Lauzon. Les actrices, lorsqu’elles n’apparaissent pas sur scène, sont toujours visibles au public parce qu’elles sont assises en haut et participent aux chansons. Un choix scénique audacieux, car il nous permet de voir plus longtemps ces actrices pleines de vitalité. La plus belle scène des Belles-Soeurs est sans contredit l’Ode au Bingo. Réunies, les femmes chantent leur amour, leur obsession et leur excitation pour ce jeu de hasard. Elles offrent au public un numéro dansant et comique dans lequel elles effectuent une chorégraphie au ralenti. « Moé, j’aime ça l’bingo, j’adore ça l’bingo. Chue tout à l’envers, j’ai chaud. J’me trompe dans mes numéros. Mes pitounes à mauvaise place. On vient toutes folles », chantent-elles en choeur.
L’espoir de gagner, le rêve de la consommation, la relation non égalitaire homme-femme, la jalousie et le jugement sont tous des thèmes abordés dans cette pièce de qualité. Germaine Lauzon est victime de son bonheur et de sa chance qui rend envieux son entourage. La scène finale surprend même si le texte de Michel Tremblay nous est familier. Kathleen Fortin, alias Germaine Lauzon, vient chercher notre empathie lorsque le rideau se ferme.
Cette pièce est un trésor québécois qui émeut ses spectateurs depuis 1968. On lui souhaite de conquérir encore plus de coeurs à travers le monde. Elle est présentée au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts jusqu’au 27 octobre et se déplace ensuite à Québec au Capitole du 7 au 25 novembre prochain. Pour se renseigner sur le spectacle et acheter des billets, rendez-vous sur : bellessoeurs.ca
Les Belles-Soeurs
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